Biodiversité et production, diversité des espèces et rentabilité ne sont pas antinomiques
Une symbiose entre biodiversité et agriculture a existé pendant des siècles. Jusqu'au début du siècle dernier, l'utilisation paysanne du sol a fortement contribué à une importante augmentation de la diversité en espèces en Suisse. Puis la tendance s'est inversée dans les années 50 avec la "révolution verte". Depuis, l'agriculture est en premier lieu responsable d'un effondrement sans précédent de la biodiversité. La rentabilité s'est écroulée de la même manière. Ce n'est pas un hasard. Économie et écologie doivent à nouveau tirer ensemble à la même corde. Projets et exploitations agricoles tracent la voie.
Alors que les indices les plus importants pour la biodiversité affichent toujours des tendances à la baisse, toujours plus d'exemples montrent comment la biodiversité peut être fortement favorisée en peu de temps avec une intégration intelligente dans les exploitations agricoles. Une production efficace et adaptée au site et la conservation de la biodiversité sont aussi intimement liées du point de vue économique. Ce qui est devenu réalité aujourd'hui pour une petite minorité d'exploitations, doit à nouveau devenir un standard. Vision Landwirtschaft considère comme l'une de ses tâches principales de rendre cela possible, avec une politique aux buts précis et enfin alignée sur le mandat de la Constitution, ainsi qu'un conseil réorienté.
On sait depuis peu que de nombreux insectes ont du mal à trouver une habitat optimal. Une nouvelle étude de l’Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage (WSL) et de l’Université de Berne montre à présent qu’il y a environ un tiers d’insectes en moins qu’il y a dix ans. Le recul le plus marqué a été constaté dans les zones agricoles exploitées intensivement. Cela montre une fois de plus qu’une transition de l’agriculture est nécessaire de toute urgence pour préserver la biodiversité à l’avenir.
On sait depuis longtemps que les pollinisateurs et les auxiliaires sont déterminants pour une riche récolte dans de nombreuses cultures. C’est justement dans ces cultures agricoles que souvent les insectes et d’autres petits animaux ne trouvent assez de nourriture plus que pour une courte période. Les prairies intensives se transforment par exemple avec la fauche en désert sans fleur pour les abeilles sauvages et d’autres pollinisateurs. Ils sont alors dépendants du pollen et du nectar de plantes sauvages d’habitats riches en espèces.
Une étude d’Agroscope montre pour la première fois plus en détail quelles plantes à fleurs et habitats doivent être favorisés car particulièrement importants pour les auxiliaires et de petits animaux, et donc pour une récolte plus sûre.
Les insectes auxiliaires, comme les coccinelles et les chrysopes, mangent des insectes ravageurs qui peuvent causer de graves dégâts dans les champs suisses. Toutefois, de nombreux auxiliaires ne se nourrissent de ravageurs que pendant une période donnée de leur vie. Ainsi les larves de coccinelles vont à la chasse aux pucerons tandis que les adultes se nourrissent de manière «végan» et dépendent du pollen et du nectar.
Des recherches menées par Agroscope ont montré qu’au printemps, des arbres qui fleurissent comme les érables, les chênes, les saules et les cerisiers sauvages sont très appréciés par les auxiliaires. En été, les insectes cherchent leur nourriture surtout dans les prairies riches en fleurs. Ces prairies son souvent exploitées comme surfaces de promotion de la biodiversité. Les insectes trouvent également d’importantes plantes fourragères dans des haies, des bandes fleuries et des ourlets.
Les services de pollinisation des insectes profitent non seulement aux cultures arables, mais aussi aux cultures spéciales comme les baies. Une étude allemande montre comment la taille des fraises est liée à la taille des haies en réseau dans lesquelles les pollinisateurs importants trouvent nourriture et protection.
La politique agricole officielle promet une agriculture durable depuis 20 ans. Elle n’a pas tenu sa promesse jusqu’ici. Au contraire, une grande partie de l’argent investi affaiblit la production durable. Une étude récemment publiée par Agroscope montre qu’un OUI à l’initiative pour une eau potable propre (IEPP) obligerait la Confédération à utiliser enfin l’argent des contribuables de manière cohérente pour une agriculture durable.
La station de recherches agronomiques Agroscope a examiné les conséquences possibles de l’initiative pour une eau potable propre (IEPP) sur l’agriculture au moyen de modèles de calculs détaillés. Différents scenarii ont été défini, chacun avec une mise en œuvre différente du texte de l’initiative. 15 des 18 scenarii ne sont pas réalistes et ont été majoritairement pris en compte dans l’étude sous la pression de l’Union suisse des paysans. Ils interprètent le texte de l’initiative de manière beaucoup plus restrictive que les auteurs de l’initiative eux-mêmes. Une telle interprétation du texte de l’initiative n’est donc en aucun cas réaliste et elle restreindrait l’agriculture bien plus fortement que nécessaire.
Peu de scenarii sont réalistes
Seuls 3 scenarii (Nr. 3, 6 et 9) correspondent à une interprétation réaliste du texte de l’initiative. C’est ce que montre Vision Agriculture dans son évaluation publiée dans le rapport d’Agroscope. Selon ces scenarii, la plus grande partie des terres agricoles de Suisse seraient exploitées à l’avenir sans pesticides après adoption de l’initiative. Les dépassements fréquents des valeurs limites de pesticides dans les captages d’eau potable et dans les eaux de surface qui sont constatés en Suisse depuis tant d’années sur presque l’ensemble des régions de grandes cultures sans amélioration, pourraient enfin appartenir au passé.
Il en va de même pour les émissions provenant de la détention d’animaux, en particulier de l’ammoniac. Ces émissions ont dépassé de plusieurs fois les valeurs limites légales dans la plupart des régions ces dernières décennies. D’après les résultats de la modélisation, l’IEPP entraîne une diminution modérée des effectifs d’animaux ainsi que des émissions – un résultat que la politique agricole n’a pas atteint jusqu’ici malgré les centaines de millions de francs des contribuables dépensés. L’IEPP devrait ainsi poser efficacement les jalons d’une agriculture enfin conforme à la législation suisse en matière de protection de l’environnement et des eaux.
Hausse du revenu agricole
D’après les calculs du modèle, les impacts économiques attendus sont particulièrement réjouissants du point de vue agricole. Si le scénario Nr. 6, le plus réaliste des trois scenarii mentionnés (évolution moyenne des prix) est retenu comme référence, le revenu augmente de 12% pour les exploitations qui maintiennent les Prestations écologiques requises PER; avec le scénario Nr. 9 qui se base sur une évolution des prix plus favorable, l’augmentation s’élèverait même à 32%. Même les exploitations qui arrêtent les PER et renoncent aux paiements directs (environ 11%), gagnent en moyenne 2% de plus car ils sont en mesure de compenser la perte des paiements directs par des rendements bruts plus élevés.
En ce qui concerne la production et l’utilisation des terres, les résultats du modèle montrent une hausse des terres ouvertes; le recul des surfaces de betteraves sucrières, d’oléagineux ainsi que des vignes, des fruits et des baies, est compensé par une augmentation des céréales et des légumes. Cela montre bien que les défis d’une adaptation essentielle aux exigences de l’IEPP pour différentes directions de production, s’inscrivent généralement dans une cadre réalisable, mais qu’ils sont d’importances diverses. Des programmes de soutien et d’ajustement appropriés doivent être mis en place pour une phase de transition de 8 ans pour les types de production particulièrement touchés. Les capacités de production et de transformation nécessaires à la sécurité de l’approvisionnement doivent continuer à être garanties comme aujourd’hui avec des contributions pour certaines cultures comme les oléagineux.
Quasiment aucun recul de la production
Malheureusement, l’étude ne fournit pas le taux net d'autoapprovisionnement pertinent (qui tient compte des importations de fourrages pour animaux). D’après un calcul ultérieur de Vision Agriculture, son recul devrait être nettement inférieur à 10%. Ce qui veut dire qu’un peu plus de produits agricoles devraient être importés, mais dans une mesure limitée même en appliquant l’initiative de manière plus restrictive. Si l’on considère les progrès techniques et de sélection dans la production sans pesticides, dont l’étude ne tient pas compte, les importations supplémentaires ne sont presque plus nécessaires.
Conclusion En partant du principe que le Parlement utilisera la marge de manœuvre du texte de l’initiative pour mettre en œuvre l’initiative aussi efficacement que possible en ce qui concerne l’environnement et la rentabilité, les effets devraient être encore nettement plus positifs que dans les seuls scenarii réalistes Nr. 3, 6 et 9 d’Agroscope. L’IEPP représente donc clairement une chance pour une agriculture suisse plus durable et en même temps plus rentable. Elle permet à la politique agricole de se développer dans une direction qui correspond exactement à ses objectifs officiels qui n’ont de loin pas été atteints depuis 20 ans.
La Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité IPBES présente ces jours à Paris son analyse mondiale sur l’état de la biodiversité. Le Président d’IPBES Sir Robert Watson a mis en garde contre un effondrement mondial de la biodiversité en début de conférence. Elle se trouverait dans une situation d’urgence grave, pour laquelle une action toute aussi énergique que celle pour le changement climatique est nécessaire.
La production de denrées alimentaires est l’activité humaine qui affecte le plus fortement les écosystèmes. L’agriculture et les menaces qu’elle fait peser sur la biodiversité, par exemple la détérioration des habitats ou la pollution de l’environnement par les pesticides, seront donc un thème central de la conférence plénière IPBES.
Pour une fois, la Suisse ne peut pas pointer du doigt d’autres pays et continents. Selon l’OCDE, les déficits dans le domaine de la biodiversité en Suisse sont particulièrement élevés, et en premier lieu dans l’agriculture.
Les forêts protègent la faune et la flore des effets du réchauffement climatique. Le feuillage préserve surtout des grandes chaleurs les organismes qui vivent dessous. Les températures sont ainsi environ 4 degrés plus fraîches dans la forêt qu’en dehors en été, et en hiver 1 degré plus chaud la nuit. Des scientifiques internationaux ont mesuré ces différences de température. Ils l’ont fait sur 98 sites dans cinq continents – sous les tropiques, dans les zones tempérées et dans les forêts boréales du nord. L’Institut fédéral de recherches sur les forêts, la neige et le paysage WSL a participé à cette étude internationale.
Le feuillage des forêts atténue considérablement la chaleur. «Les plantes et les animaux à l'intérieur des forêts subiront donc moins la tendance actuelle au réchauffement que les espèces qui ne vivent pas dans les forêts», explique l’un des auteurs de l’article. «Étant donné que les forêts couvrent un quart de la surface terrestre du globe et abritent les deux tiers de la diversité biologique, cela a des implications importantes pour les prévisions sur l'impact du changement climatique».
Un cocktail de différents pesticides menace les colonies d'abeilles. C’est ce que confirme l’analyse des abeilles mortes l’an dernier. Les abeilles étaient contaminées par 10 à plus de 20 différentes substances actives. À ce jour, la recherche en sait encore beaucoup trop peu sur la manière dont le mélange de pesticides agit sur les animaux. C’est ce qu’écrit le centre de conseil et de compétences pour l’apiculture Apiservice.
Quinze apiculteurs ont annoncé une mortalité notable d’abeilles l’an dernier en 2018. Des analyses de laboratoire ont confirmé une intoxication aiguë dans quatre cas. En sont responsables les insecticides bifenthrine et chlorpyrifos, ainsi que les biocides fipronil et perméthrine. Ces substances actives sont largement utilisées en agriculture. Marianne Tschuy, experte en santé et intoxication des abeilles, explique: «Comme les méthodes d’analyse s’améliorent constamment, des quantités plus petites de substances peuvent être détectées.» En outre, les effets à long terme des «cocktails de pesticides» sur les colonies d'abeilles sont encore à peine connus.
Vision Agriculture recherche des pommes non traitées d’arbres fruitiers haute-tige. Cela s’adresse aux exploitations Bio comme aux exploitations conventionnelles qui respectent les prestations écologiques requises. Elles doivent pouvoir livrer au moins 300 kg de pommes de tables et/ou 1000 kg de pommes à cidre de culture d’arbres à haute tige, toutes les variétés sont les bienvenues.
Vision Agriculture soutient et met en réseau des initiatives qui combinent une production sans pesticides avec une bonne valeur ajoutée et une grande efficacité de production. Un tel projet a été réalisé pendant 2 ans par l'IG Kulturlandschaft et l'Office fédéral de l'agriculture en tant que projet pilote : «Ungespritztes Tafelobst von Hochstammobstbäumen» (fruits de table non pulvérisés provenant d'arbres fruitiers à haute tige). La start-up Öpfelchasper a spontanément décidé de lancer une campagne pour faire connaître les fruits non traités des arbres à haute tige. Öpfelchasper paie pour cette campagne un prix de Fr. 3,20 par kg de fruits de table et 50 ct./kg de fruits à cidre. Öpfelchasper approvisionne les citadins sur leur lieu de travail et pendant leur temps libre : en fruits frais biologiques et toujours à vélo. Lire l'appel et les conditions en allemand dans Schweizer Bauer.
Plus tout renseignement : Ralph Hablützel, Vision Agriculture, 079 135 15 85
En 26 ans, les populations d’oiseaux ont dramatiquement diminué en Suisse dans les régions agricoles, sur l’ensemble des espèces de plus de moitié. Certaines espèces sont menacées d’extinction en Suisse. L’utilisation de pesticides, un paysage agricole monotone et une exploitation très intensive, en sont les raisons. Les oiseaux manquent simplement de nourriture, insectes et graines. Il manque aussi de structures pour les sites de reproduction.
La part des surfaces de promotion de la biodiversité est inférieure à 1% dans les terres cultivées, donc extrêmement faible. De plus, la qualité écologique de ces surfaces fait souvent défaut.
Les objectifs de la politique agricole n’ont manifestement pas été atteints dans le domaine de la biodiversité. La situation est meilleure outre-Rhin, alors que les paiements à l’agriculture ne représentent qu’environ 10% de ceux de la Suisse.
Une nouvelle étude met en évidence que l'agriculture biologique favorise le potentiel global de lutte biologique.
En utilisant deux méta-analyses distinctes, les chercheurs français montrent que par rapport aux systèmes de culture conventionnels, l'agriculture bio ne subit pas plus d’infestation de ravageurs, mais elle est par contre plus envahie par les plantes adventices. La plus forte présence de ces "mauvaises herbes" en bio permet d’améliorer la lutte globale contre les parasites et les agents pathogènes. Cette étude conclut que les cultures tomberaient moins malades sans les pesticides censés les protéger et que l’agriculture bio « offre un moyen de réduire l'utilisation de pesticides synthétiques ».
La Suisse est tout sauf un paradis pour les oiseaux. En comparaison internationale, de nombreuses espèces sont particulièrement menacées dans notre pays. Selon les experts, l’exploitation intensive des terres cultivées et l’utilisation élevée des pesticides en sont parmi les causes principales.
Dans l’ensemble, près de 40% des oiseaux de Suisse figurent sur la liste rouge des espèces menacées. C’est un chiffre record en comparaison internationale. D’après les nombreuses données disponibles en Suisse, en particulier les zones agricoles intensives et leur fertilisation excessive, l’utilisation excessive de pesticides, contribuent à cette évolution alarmante. De plus, il n’y a pas assez de petites structures telles que des haies, des arbres individuels ou des bandes herbeuses.
La Suisse mène la politique agricole la plus coûteuse du monde et justifie cette dépense annuelle de plusieurs milliards par son engagement ciblé en faveur d’une agriculture durable. Cependant, la majorité de cet argent a encore l’effet inverse: une intensification encore plus grande de la production et donc une agriculture particulièrement dommageable pour l’environnement. La politique agricole détruit ainsi ses propres efforts pour accroître la biodiversité. Malgré les milliards versés, aucune des exigences légales en matière d’environnement n’a encore été satisfaite: c’est une bilan désastreux que le Conseil fédéral a dû lui-même admettre récemment.
L’Union suisse des paysans rejette ces conclusions depuis des années avec toujours les mêmes réactions. David Brugger, chef de la production végétale à l’Union suisse des paysans, demande des fonds fédéraux supplémentaires pour la poursuite des recherches. On devrait en savoir plus avant de pouvoir prendre des mesures ciblées.
Pendant ce temps, le mécontentement de la population à l’égard de la politique agricole désastreuse de la Suisse continue de croître, comme le montrent souvent les réactions des lecteurs sur les blogs.
Les droits de douane élevés, qui protègent la filière de la viande en Suisse, ont des conséquences considérables sur l’environnement. Le marché cloisonné a pour effet qu’il y a bien plus de viande produite en Suisse que ne pousse de nourriture pour ces animaux. Plus d’un million de tonnes d’aliments pour animaux sont désormais importés chaque année pour nourrir le nombre excessif d’animaux d’élevage. Et cela augmente encore. Il en résulte d’immenses quantités de lisier dont on ne peut presque plus se débarrasser. Le plus grand problème reste celui des émissions d’ammoniac. La Suisse est le deuxième plus gros pollueur d’Europe après les Pays-Bas dans ce domaine, avec de graves conséquences pour la biodiversité.
Plusieurs études montrent que 30 % des oiseaux des campagnes françaises ont disparu en quinze ans, du fait de l’intensification des pratiques agricoles. Le Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) et le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) ont annoncé les résultats principaux de deux réseaux de suivi des oiseaux sur le territoire français et évoquent un phénomène de « disparition massive », « proche de la catastrophe écologique », « les oiseaux des campagnes françaises disparaissent à une vitesse vertigineuse».
Cette diminution apparaît directement corrélée aux pratiques agricoles intensives. >> En savoir plus
Chaque année, 2,3 millions tonnes de fumier et de lisier, soit 77'000 gros chargements de camions, sont transportés à travers toute la Suisse parce que les importations d'aliments pour animaux pour de nombreuses exploitations agricoles, et le cheptel excessif qui en résulte, ont perdu toute mesure. Il y a tellement de lisier et de fumier produits qu'ils sont même exportés vers le nord de l'Allemagne, comme le rapporte le magazine de consommation Saldo.
Cela n' a rien à voir avec l'agriculture en tant que production primaire, avec des cycles fermés ni a vec une production respectueuse des ressources. Il s'agit de production animale industrielle, de transports absurdes et d'émissions d'ammoniac beaucoup trop élevées.
Soit dit en passant, ce cheptel excessif n'est rentable qu'en raison de la force la protection aux frontières. Si les droits de douane étaient abaissés, de nombreux problèmes environnementaux illégaux seraient résolus d'eux-mêmes.
Le „Biodiversity and Landscape Guide“ expose les principes de base les plus importants pour une promotion ciblée de la biodiversité et de la qualité du paysage dans les exploitations agricoles, et donne de nombreux exemples d’exploitations du monde entier qui ont relevé ce défi.
Le livre a été initié et co-écrit par le directeur de Vision Agriculture. Il est disponible gratuitement sur internet sous forme de fichier pdf depuis février 2017. La version imprimée peut être commandée sur le site de l’IFOAM (en anglais).
La production de sapins suisses est en augmentation. Mais la provenance locale n'est pas toujours motivée par des choix écologiques. Un projet mené par Coop et Vision Agriculture montre comment il est possible de lier les deux !
(VL) Des centaines de milliers d’arbres de Noël prennent ces jours le chemin du domicile de nombreux Suisses. Mais souvent, les sapins proposés sur les marchés ont déjà un long chemin derrière eux. La majorité vient de l’étranger, en particulier d’Allemagne et du Danemark. Mais la proportion de ceux qui sont produits en Suisse a progressé ces dernières années pour atteindre pratiquement 50%. Ceci constitue une bonne nouvelle, car cela crée de la valeur ajoutée pour l’agriculture et la sylviculture tout en réduisant l’impact des transports. De plus, ces sapins de Noël peuvent être cultivés de manière naturelle et durable, ce qui est également bénéfique pour l’environnement.
Cette affirmation n’est cependant pas valable pour tous les arbres produits en Suisse. Dans le cadre du plan de réduction des pesticides pour la Suisse, Vision Agriculture a mené son enquête en 2014 sur les méthodes de production dans plusieurs régions de Suisse. Il en est ressorti que les pesticides étaient utilisés sur de nombreuses surfaces à vocation agricole, parfois avec des produits interdits.
Des alternatives valables sont disponibles
L’emploi d’herbicides dans la culture de sapins de Noël est de loin la plus problématique. Ces derniers sont utilisés plusieurs fois par année pour supprimer toutes les mauvaises herbes. Le controversé glyphosate, mais également d’autres herbicides toxiques sont employés. Avec un sol mis à nu, le risque de ruissellement des eaux de surface et de lixiviation dans les eaux souterraines est particulièrement grand. De plus, les distances minimales de pulvérisation visant à la protection des cours d’eau, des boisements ou des chemins n’était pas respectées dans la moitié des cas.
En plus de l’utilisation avérée d’herbicides, des fongicides est des insecticides ont aussi été employé, ce qui est dommage, car de bonnes alternatives existent. Par exemple, certains producteurs utilisent la pâture avec des moutons pour supprimer les mauvaises herbes, sans utiliser de pesticides. On estime qu’un bon 10% des sapins de Noël produit en Suisse le sont sur des surfaces forestières, où aucun pesticide n’est autorisé. Le plus souvent, ces surfaces sont particulièrement riches en espèces, comme Vision Agriculture a pu le constater dans son enquête.
Coop va de l‘avant
Fort de ces conclusions, Vision Agriculture s’adressa à la Coop, le plus grand détaillant de sapins de Noël produits en Suisse, afin d’établir un cahier des charges visant à instaurer des pratiques durables permettant de réduire considérablement l’utilisation de pesticides.
Coop s’est montré ouvert sur ce sujet et a demandé une mise en œuvre rapide et pragmatique. Les lignes directrices ont également fait l’objet de discussions intenses avec IG-Suisse Christbaum qui regroupent les producteurs de ces arbres. Afin de ne pas trop les pénaliser, certaines mesures de réduction des pesticides ont dû être abandonnées, du moins pour l’instant. Néanmoins, l’adoption de ces directives limitant une culture intensive aura permis de diminuer de moitié l’utilisation de ces produits.
Détaillants et consommateurs pour une production durable
Désormais, tous les producteurs d’arbres de Noël désirant fournir la Coop devront dès cette année se conformer à ces nouvelles lignes directrices. Des contrôles externes seront réalisés. Cette réduction de l’utilisation des pesticides a été réalisée par de nombreuses plantations suisses de sapins, ce qui devrait les distinguer des arbres produits à l’étranger. Dans ce cas précis, local signifie également durable. Et il y a fort à parier que les autres détaillants vont emboîter le pas de Coop d’ici peu.
Vous pouvez contribuer à ce que cette norme de réduction, voire d’abandon d’ici à quelques années, des pesticides devienne un standard national en privilégiant par votre achat ce type d’arbres. N’hésitez pas à demander d’où vient votre sapin et comment il a été produit. Et si les réponses ne vous donnent pas satisfaction, optez pour un arbre bio ou qui suit les lignes directrices de la Coop !
Nous vous souhaitons de merveilleuses fêtes de Noël !
Chaque année, environ 100'000 tonnes d’azote sont importées en Suisse sous forme d’aliments concentrés ou d’engrais de synthèse. De ce fait, les limites légales d’émissions sont dépassées depuis des décennies, en particulier pour l’ammoniac. Une taxe d'incitation sur l’azote permettrait de résoudre ce problème de manière rentable et sur le long terme. C’est la vision proposée dans cette étude.
Comparaison entre haut rendement et pâture intégrale assortie d'une faible utilisation d'aliments concentrés
Au cours des dernières années, plusieurs études ont montré qu'une réduction des coûts de production pouvait sensiblement améliorer les revenus des exploitations laitières suisses. A cet égard, la réduction de l'utilisation d'aliments concentrés et le recours à des systèmes de pacage en lieu et place d'une stabulation à grands frais offrent des possibilités notables de diminution des coûts.
La majorité des exploitations laitières suisses misent aujourd'hui sur une stratégie de haut rendement, avec stabulation et emploi d'aliments concentrés. Le présent document examine les possibilités d'amélioration des revenus et les principales incidences écologiques résultant de l'adoption de systèmes de pâture assortis d'une diminution substantielle de l'emploi d'aliments concentrés. Les calculs se fondent sur des études ayant établi une comparaison empirique de diverses stratégies de production laitière.
Pour garantir l’approvisionnement alimentaire des hommes, selon la thèse largement répandue, il faut impérativement augmenter les rendements agricoles. Cependant un examen plus approfondi des interrelations complexes montre qu’une production encore plus intensive est la stratégie la plus inefficace et la plus nuisible à la sécurité de l’approvisionnement dans les pays avec une agriculture „high-input“.
Dans un pays comme la Suisse, avec une production agricole intensive, accroître encore les rendements ne contribuerait ni à la sécurité alimentaire nationale, ni à l’alimentation mondiale, bien au contraire. Nous en avons déjà parlé dans une newsletter précédente (novembre 2015). Ici la question est : est-ce qu’il existe des alternatives ? De fait, il n’en manque pas. Les quatre les plus importantes ne sont pas seulement meilleur marché, mais agissent aussi plus rapidement, de manière plus durable, en respectant plus la santé et l’environnement qu'une croissance des rendements.
Une meilleure distribution et un meilleur accès à la nourriture : alors qu’il y a des excédents de produits alimentaires dans les pays industrialisés, que la population souffre de surpoids et que des moyens financiers doivent être investis pour atténuer les effets négatifs sur les prix d’une production qui n’est pas adapté aux lois du marché, les pays à marché émergent et en voie de développement souffrent de pénuries alimentaires et de sous-alimentation. Si la nourriture était distribuée selon les besoins et les disponibilités, ce ne serait plus 900 millions de personnes qui vivraient sur terre en étant sous-alimentées, mais un milliard de personnes supplémentaires nourries avec les denrées alimentaires disponibles aujourd’hui. La Suisse porte sa part de responsabilité dans la distribution inégale des denrées alimentaires, par exemple avec les subventions à l’exportation directes et cachées.
Minimiser le gaspillage alimentaire (food waste) : un tiers des denrées alimentaires qui sont produites pour la consommation en Suisse, sont perdues entre le champ et l’assiette. Cela correspond à environ deux millions de tonnes de produits alimentaires irréprochables qui sont détruits chaque année en Suisse. On pourrait éviter en partie ces pertes. Elles représentent plusieurs fois la différence de rendement légèrement inférieur qui résulterait par exemple d’une production plus durable ou avec un usage réduit de pesticides.
Réduire la consommation de viande à un niveau ménageant la santé : la production de protéines – que ce soit sous la forme de viande, de lait ou d’œufs – est une manière très inefficace de produire des denrées alimentaires sur des terres cultivables. Ce serait 5 à 30 fois plus efficace de cultiver directement des produits pour l’alimentation humaine par rapport à une quantité équivalente de calories par le biais de la production de viande. Si les terres arables disponibles dans le monde étaient utilisées directement pour l’alimentation humaine, on pourrait nourrir 4 milliards d’hommes en plus. Rien que cette mesure suffirait largement à nourrir l’humanité à venir selon les projections les plus hautes de croissance de population. En Suisse aussi, la consommation de viande se situe bien en-dessus des niveaux supportables pour l’environnement et notre santé. Les suisses mangent environ 65 kg de viande par an, soit 20 fois plus que les Indiens. Le citoyen suisse moyen mange ainsi trois fois plus de viande que la quantité recommandée par les médecins de 300 gr. par semaine. Si la consommation de viande reculait à ce niveau en Suisse, le pays pourrait, rien qu’avec cette mesure, améliorer son taux d’auto-approvisionnement de presque 60% à 80 ou 100%. 300 gr. par personne, cela représente exactement la quantité de viande qui pourrait être produite de manière durable sur les herbages de Suisse – à savoir là où une production est possible rien qu’avec des animaux mangeant de l’herbe et pas de cultures qui concurrencent directement l’alimentation humaine.
Eliminer les méthodes de production particulièrement inefficaces, comme la production de lait basée sur les aliments concentrés : parmi les deux méthodes de production les plus inefficientes en Suisse, on trouve l’élevage de vaches-mères sur des terres arable et la production laitière basée sur l’importation d’aliments pour animaux. Rien que les aliments concentrés qui sont donnés aux vaches laitières – en grande partie importés et produits dans des conditions très problématiques – nécessitent des surfaces de terres assolées qui permettraient de nourrir net 2 millions d’hommes en plus. Soit un quart de la population suisse. Renoncer aux aliments concentrés réduirait à peu près la production laitière de la quantité actuelle d’excédents sur le marché. De tels efforts ne rendraient pas seulement le rendement effectif en calories pour l’alimentation humaine bien plus élevé qu’une augmentation supplémentaire des rendements. Ils pourraient aussi être mis en œuvre à court terme et générer ainsi un revenu supplémentaire de la production primaire.
Conclusion Il existe des mesures qui peuvent augmenter le taux d’auto-approvisionnement et la sécurité de l’approvisionnement de manière bien plus forte et meilleur marché qu’une production intensive et conditionnée à de hauts rendements, qui entraîne de grands dommages à l’environnement et réduit le potentiel de production du sol. Parmi ces mesures efficaces, il y a les efforts qui intègrent le gaspillage alimentaire, la consommation de viande et l’utilisation efficiente des ressources. De telles mesures doivent à l’avenir être au centre des efforts de la politique agricole pour la sécurité alimentaire et remplacer l’actuelle détermination indéfendable à rechercher des rendements les plus hauts possibles qui doivent continuer à croître. Cela laisserait ainsi une important marge de manœuvre pour une production plus durable, plus respectueuse de l’environnement, et qui en même temps maintiendrait et améliorerait des bases de production au lieu de les dégrader de plus en plus.
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FONDATION POUR LA RECHERCHE SUR LA BIODIVERSITÉ / RAPPORT SCIENTIFIQUE 26.2. 2016
Le groupe d'experts internationaux spécialisés sur la biodiversité a publié son premier rapport qui alerte sur le déclin au niveau mondial des espèces pollinisatrices. Au niveau mondial, un nombre croissant de pollinisateurs sont menacés d'extinction, or 80% des cultures à travers le monde sont dépendantes de l'activité des insectes pour la pollinisation. Ce déclin mondial aura donc des impacts sur les hommes et leur sécurité alimentaire.
Une autre agriculture est possible, et vous n’êtes pas seuls à la revendiquer: tel est le message que l’Association Pissenlit voudrait transmettre aux paysans. À cette fin, les quatre membres de l’association sont allés à la rencontre d’agriculteurs vaudois pour les interroger sur leurs pratiques agricoles, leurs motivations, leurs préoccupations.
Quatre personnes qui suivent la formation de « conseiller/ère en environnement » du WWF ont choisi pour leur travail final de 4 mois de s’intéresser à des paysans vaudois qui préservent l’environnement et recherchent l’autonomie. Le projet « de Paysan à Paysan » est parti du constat que l’approche face aux défis d’une agriculture durable est très différente d’un agriculteur à l’autre et la plupart cloisonnent leurs concepts et leurs techniques alors qu’il existe de multiples voies praticables. Le but du travail était donc de rendre visible et de « mettre en culture ces savoir-faire ».
Pour cela, l’Association Pissenlit est allée sans connaissance spécifique de l’agriculture, ni idée reçue, à la rencontre de 24 agriculteurs du canton de Vaud dans le but de recenser de bonnes pratiques agricoles qui tendent à utiliser moins d’intrants, prendre soin du sol et favoriser la biodiversité. Tous les entretiens ont été filmés et retranscrits par écrit. Le premier résultat du projet est ainsi un répertoire de savoir-faire à véhiculer comme exemples positifs. Ce répertoire doit, entre autres, répondre aux besoins de paysans qui pensent qu’une autre agriculture est possible mais ne savent pas vers qui se tourner.
Ces discussions avec les agriculteurs ont aussi contribué à identifier les motivations et les freins à ces pratiques agricoles alternatives. Ceux qui se lancent dans la recherche d’une agriculture plus durable sont motivés par la production d’une alimentation de qualité, saine et nutritive, pour eux comme pour les consommateurs. Ils sont également portés par le désir d’être payé décemment et de se libérer de la pression de l’agro-industrie sur les prix. Les exploitants manquent d’alternatives entre la grande distribution et la vente directe à la ferme pour l’écoulement de leurs produits. Les difficultés viennent aussi de la politique agricole qui pousse à la productivité croissante de grandes exploitations mais pas assez à la protection d’une production de valeur régionale. Les paysans sont très dépendants du système en place et mal informés et instruits sur les alternatives possibles. Le manque d’enseignement sur la biologie du sol est par exemple flagrant. L’Association Pissenlit a élaboré des pistes pour dépasser ces obstacles.
L’un des objectifs de départ du projet « de Paysan à Paysan » consistait à valoriser les savoir-faire, renforcer les liens entre paysans pour favoriser des échanges de compétences que ce soit pour la préservation de l’environnement ou l’amélioration du bien-être personnel. De ces rencontres avec les agriculteurs résultent six portraits écrits publiés dans le journal et sur le site d’Uniterre, sur la page Facebook de l’Association Pissenlit et sur la Plateforme Agroécologie Suisse. De plus six vidéos de quelques minutes ont été réalisées et sont disponibles sur ces mêmes sites. Enfin, une visite de champs sur la biologie du sol a aussi été organisée chez l’un des agriculteurs Bio pour une étude collective d’un profil de sol avec l’accompagnement d’un expert. À l’image de réseaux d’échange de semences paysannes, l’idéal serait d’avoir un réseau d’échange de pratiques agricoles durables.
Les paysans suisses sont étranglés par leurs coûts de production très élevés versés aux industries toutes-puissantes en amont et en aval de leur activité. Ils sont aussi pris en otage entre les attentes des consommateurs pour une production écologique de denrées alimentaires et leur revendication de prix bas. Ils ont perdu pour beaucoup la fierté de leur métier dont ils n’arrivent plus à vivre décemment. Pour qu’une technique soit aujourd’hui reconnue, elle doit être « validée » par la recherche et ses experts scientifiques. Or un riche savoir et savoir-faire se trouve aussi chez ceux qui pratiquent tous les jours une agriculture alternative respectueuse de l’homme et de l’environnement. La diffusion de l’information sur des techniques individuelles et innovatrices au sein de la profession, mais aussi auprès des consommateurs, est un des piliers de ce projet de promotion et de sensibilisation de l’agriculture durable. C’est également ce que propose le projet « von Bauern für Bauern » (de paysans à paysans) depuis 2002 en utilisant des vidéos pour transmettre des expériences innovatrices et positives d’agriculteurs et de viticulteurs, comme pour la protection des sols, l’agriculture Bio de montagne ou encore la gestion de l’entretien des pâturages. Ces informations sont destinées aussi bien aux paysans qu’aux enseignants ou vulgarisateurs agricoles.
L’Association Pissenlit est en train d’organiser la diffusion et la projection de certaines de ses vidéos dans différentes manifestations. Elle recherche aussi à valoriser d’autres informations récoltées avec le soutien d’organisations partenaires.
Pour 2016, nous soufflons sur les aigrettes de Pissenlit en faisant le vœu que leurs idées se disséminent et qu’avec Vision Agriculture et d’autres organisations, la transmission des expériences et du savoir paysan pour une agriculture plus durable se développe en Suisse.
Produire le plus possible, c'est devenu le but principal des organisations paysannes. La Confédération encourage aussi une production alimentaire toujours croissante en Suisse à travers la protection aux frontières, des subventions forfaitaires et des primes de cultures. Et cela au nom de la sécurité de l'approvisionnement. Pourtant une forte production en temps normal ne garantit pas un approvisionnement en cas de crise, et peut même le menacer. C'est le cas quand la production dépend toujours plus d'importations - par exemple fourrages, énergie, machines, engrais, pesticides - ou quand elle endommage la fertilité des sols. En outre, les prix aux producteurs souffrent d'une production trop forte. Combien faut-il produire pour assurer une sécurité à l'approvisionnement, qui de plus soit acceptable? Vision Agriculture se penche sur cette question dans une nouvelle étude. Les résultats montrent que la sécurité à l'approvisionnement peut aussi être garantie avec 10 à 20 pourcent de production de moins qu'aujourd'hui. Pour autant que les réserves de terres nécessaires soient disponibles.
Entre le champ et l'assiette, plus de la moitié de la récolte de pommes de terre se perd. C'est ce que montre une récente étude d'Agroscope et de l'EPFZ. Pour que la situation s'améliore, il faudrait que producteurs et commerçants optimisent leurs pratiques et que les consommateurs changent leurs habitudes.
Une équipe internationale de chercheurs a démontré qu'une biodiversité élevée augmente la résistance de ces écosystèmes à une large gamme d'événements climatiques (sécheresse, canicule, pluies extrêmes). Ces résultats bouleversent les études habituellement menées en écologie, dont les mesures de stabilité des écosystèmes sont en partie basées sur leur capacité à retrouver un fonctionnement normal après une perturbation et non sur leur faculté à résister à cette perturbation.
Le numéro 32 de Hotspot est consacré aux « bons génies du sous-sol » auxquels la recherche alloue encore trop peu de fonds. Il y est question aussi bien des systèmes culturaux qui favorisent la vie dans le sol que du rôle des micro-organismes du sol qui interviennent dans la dynamique du phosphore.
Les effets positifs de promotion de la biodiversité en agriculture ne manquent pas. L'objectif de la politique agricole de stopper le recul des espèces n'est pourtant pas atteint. D'autres efforts sont nécessaires. C'est de que constate le rapport "État de la biodiversité en Suisse en 2014" dans le chapitre consacré aux milieux agricoles. Pourtant production et biodiversité ne doivent pas être opposées, comme le montre des projets innovateurs. La production IP et Bio et un conseil ciblé sont particulièrement importants. Les exemples montrent que cela permettrait aussi d'améliorer nettement le revenu des agriculteurs.
Agroscope a développé le programme de monitoring ALL-EMA «Arten und Lebensräume Landwirtschaft – Espèces et milieux agricoles». Sur mandat des Offices fédéraux de l'agriculture et de l'environnement, des relevés seront répétés tous les 5 ans pour déterminer quelles mesures sont particulièrement favorables à la biodiversité dans le paysage agricole et étudier l'évolution de la diversité des espèces et l'effet des surfaces de promotion de la biodiversité. >> En savoir plus sur le programme de monitoring ALL-EMA
Le projet "Regio Flora" vient d'être lancé par Pro Natura pour préserver la biodiversité régionale des prés fleuris et permet de la valoriser économiquement grâce au semis direct. Les Offices fédéraux de l'agriculture et de l'environnement, plusieurs cantons, AGRIDEA, Infoflora et d'autres institutions y sont associés. Le transfert de semences d'une surface donneuse à une surface receveuse les plus proches possibles d'une de l'autre permet de favoriser la biodiversité typique d'une région et de préserver les écotypes adaptés à cette région. La nouvelle homepage "Regio Flora" montre ce à quoi il faut prendre en considération pour obtenir la diversité en espèce souhaitée. >> Regio Flora
Le Bio peut toujours devenir "conventionnel". Mais le Bio, c'est aussi très varié. Toujours plus d'exploitations Bio vont aujourd'hui bien au-delà des exigences "ordinaires" de l'agriculture biologique. L'exploitation maraîchère de Roger Gündel montre à quoi cela peut mener. Son type d'agriculture se distancie plus de l'agriculture biologique que le Bio ne le fait de l'agriculture conventionnelle. Son "Bio+" montre clairement le potentiel qui existe dans une agriculture adaptée au lieu et à la nature.
Roger Gündel est maraîcher corps et âme. Son père dirigeait déjà une exploitation horticole. Quand le fils a pu en reprendre une partie en 1995, il s'est tout de suite converti au Bio. Mais ce n'était qu'une première étape, et avec le recul relativement petite. Depuis bien d'autres pas ont été franchis. Aujourd'hui, les pratiques culturales de Birchhof diffèrent bien plus du Bio "usuel" que le Bio de l'agriculture conventionnelle. De premier abord, c'est à peine visible. Dix serres entourent la maison légèrement en contre-haut sur une colline entre la vallée de la Reuss et de Reppisch. La vue s'étend au-dessus de larges champs et de forêts jusqu'aux Alpes. On trouve un atelier bien équipé juste à côté de la maison. Des légumes d'hiver fraîchement récoltés sont préparés dans une halle. Les cultures maraîchères sont un peu plus loin le long de la forêt.
Roger Gündel avec des stagiaires
C'est seulement en entrant qu'on remarque que tout est plus vert que d'habitude. Diverses herbes poussent de toute part et couvrent complètement le sol avec une fine couche de paillis. Roger Gündel est l'un des premiers et des rares producteurs de légumes en Suisse qui cultive toujours sans labour.
Il y a quatre ans, et après plusieurs années d'expériences préliminaires, il est complètement passé à cette méthode qui conserve les sols, réduit le CO2 et économise de l'énergie. C'est une entreprise risquée à 600 m d'altitude avec des sols lourds et argileux et plutôt de fortes précipitations. Il n'a récolté que des regards incrédules quand il cherchait des conseils auprès de collègues. La culture sans labour n'est pas nouvelle. Récemment elle est même revenue à la mode. Depuis un an, il y a même des paiements directs spéciaux pour cette pratique. On trouve toujours plus de maïs, mais aussi de blé ou de colza cultivés sans labour. Mais presque seulement dans des exploitations conventionnelles. Les mauvaises herbes sont alors éliminées avec des herbicides au lieu d'être enfouies par le labour, ce qui augmente l'utilisation de produits phytosanitaires et discrédite la méthode. La culture sans labour et sans herbicide n'est pratiquée en Suisse que par très peu de producteurs pour des cultures simples, et encore moins pour des cultures difficiles comme les légumes.
Un point crucial est la technique. Gündel a bricolé son matériel jusqu'à ce qu'il trouve la solution pour son exploitation. Après deux années de prairies artificielles, qui font partie de la rotation des cultures, le déchaumage se fait chaque fois avec un cultivateur superficiel léger muni des roues de soutien. Le même tracteur léger est utilisé dans les champs de légumes. Le même tracteur léger est utilisé dans les champs de légumes avec lequel on ne roule que sur des bandes laissées enherbées de la largeur des roues. Ici entre principalement en action un appareil qui ameublit le sol et en même temps maintient à un niveau faible ou arrache les herbes qui poussent entre les rangées de légumes. De fabrication maison également.
La pression des mauvaises herbes est en plus réduite avec une couche de paillis. Du même coup cela améliore l'apport en substances nutritives aux légumes. Du reste le paillis semble être un deuxième élément clé du succès des cultures de Birchhof. Dans les serres surtout, rien ne va sans paillage. Tomates, salades et concombres sont placées dans une épaisse couche de litière de prairie et de roseau – ou les plants sont simplement posés dessus. Cela contredit pourtant toutes les théories selon lesquelles une litière pauvre en nutriments priverait trop le sol de substances nutritives. Pourtant cela fonctionne à en juger les légumes verts et juteux et les bonnes expériences faites jusqu'à présent. Un travail de diplôme devrait mieux expliquer à quoi cela tient.
Depuis que certains granulés anti-limaces sont autorisés en agriculture biologique, Gündel y recourt aussi mais seulement en faible quantité, 25 kg sur toute l'exploitation, alors qu'ailleurs souvent 50 kg sont utilisés par hectare. En plus sont appliqués par année à Birchhof encore 1 kg de préparation à base de Bacillus Thuringensis contre la teigne du poireau et si besoin est le doryphore, ainsi que 1 litre maximum de préparation végétale de Neem contre des acariens pour les concombres et les aubergines. Birchhof ne parvient pas à se libérer totalement des produits phytosanitaires. Cependant de nombreuses cultures ne sont absolument pas traitées, comme des salades, des choux ou des oignons. Ce n'est pas qu'une différence importante par rapport à l'agriculture conventionnelle, où les oignons par exemple peuvent être traités près de 30 fois jusqu'à la récolte. Contrairement à l'agriculture biologique ordinaire, Gündel n'utilise pas de cuivre, même dans les pommes-de-terre. "La grande biodiversité, le système de cultures préservant les sols, mais aussi les préparations biodynamiques sont des éléments déterminants pour que les plantes restent en bonne santé", assure Gündel. Il fait par exemple bien attention à la présence de quelque chose de fleuri sur chaque surface. Ce sont souvent des plantes qui ne sont généralement considérées que comme des mauvaises herbes.
Kräutervielfalt
Le dernier projet de Birchhof concerne le domaine social: Gündel aimerait transformer son exploitation à moyen terme en une coopérative, une "Community Supported Agriculture" (CSA) ou "agriculture contractuelle régionale", dans laquelle les consommatrices et consommateurs font partie de l'exploitation en tant que coopérateurs, s'engagent à venir acheter une certaine quantité de légumes, mais aussi participent activement à la culture et à la récolte. L'association Vision Birchhof a été fondée il y a deux ans et déjà près de 40 abonnés reçoivent leur panier de légume selon ce système.
Discuter avec Roger Gündel procure ce sentiment agréable que l'agriculture est le travail le plus passionnant du monde. Un après-midi n'est de loin pas suffisant pour approcher ou se pencher plus avant ou même approcher les nombreuses perspectives qu'offre de la "croissance vers l'intérieur".
L'exploitation maraîchère Bio-Birchhof en chiffres:
Surface agricole utile 14 ha, dont 4 ha de légumes, 2 ha de sapins de Noël, 1 ha de verger à basse tige extensif, 4 ha de prairies artificielles dans la rotation de culture, 10% de surfaces écologiques.
5 employés permanents, dont 2 apprentis, jusqu'à 10 personnes à l'heure.
Commercialisation: marché, coopérative Vision Birchhof, magasin à la ferme, boutiques Bio de la région.
La perte de la biodiversité dans les prairies des régions de plaine en Suisse est beaucoup plus importante qu'on ne le pensait. Pourtant, en 1950, 85% des prairies même utilisées de manière intensive avaient suffisamment d'espèces pour la qualité écologique (SPB) pour atteindre ou largement dépasser le niveau QII. Aujourd'hui, même pas 20% des prairies écologiques atteignent les critères QII.
Quand il a repris la ferme sur laquelle il a grandi, Hanspeter Hunkeler a voulu favoriser la biodiversité tout en gardant l'exploitation productive. C'est ce que ce passionné de nature a réussi en optimisant ses coûts et en s'adaptant aux conditions cadres de la politique agricole.
Le soutien, par le Confédération et les cantons, de l'élevage d'animaux non adapté au site et partiellement ou totalement indépendant du sol est contradictoire à plusieurs niveaux avec les tâches principales politiques et légales – comme pour l'aménagement du territoire, les objectifs environnementaux de l'agriculture, mais aussi les buts de la Constitution concernant l'agriculture pour une production durable et paysanne. Le boom de nouvelles constructions d'étables avec une base fourragère propre insuffisante, ne doit plus être soutenu avec de l'argent des contribuables et des privilèges.
(VL) Les constructions d'étables sont autorisées en région agricole depuis des décennies. Elles sont même souvent en plus soutenues par des moyens publics même si la base fourragère de l'exploitation concernée manque. C'est ainsi que les importations d'aliments pour animaux sont de plus en plus volumineuses, pour dépasser depuis peu un million de tonnes par année. Pour réussir à nourrir le nombre surélevé d'animaux d'ici, la Suisse "exploite" de nos jours des terres assolées à l'étranger, surtout en Amérique du Sud, qui représentent autant de surfaces que les terres assolées de la Suisse. Cela ne conduit pas qu'à de nombreux problèmes environnementaux. Trois exemples parmi d'autres : lacs oxygénés artificiellement, transport de lisier à travers la moitié de la Suisse, ou émissions d'ammoniac. Ces dernières comptent parmi les plus hautes d'Europe et entraînent des dommages irréversibles aux écosystèmes sensibles comme les forêts et les tourbières. Le développement de ces atteintes à l'environnement est clairement en opposition avec les objectifs environnementaux pour l'agriculture (OEA). Ce boom de construction d'étables est tout autant absurde du point de vue de l'aménagement du territoire car de précieuses surfaces d'assolement sont bâties et des constructions supplémentaires sont soutenues dans le paysage non construit en dehors des zones à bâtir.
L'industrie en amont comme élément moteur
Pendant des années, le boom de nouvelles étables concernait avant tout la production porcine. D'innombrables porcheries ont surgi dans la zone agricole, dont les animaux étaient exclusivement nourris avec du fourrage importés sur l'exploitation et dont le lisier ne pouvait pas être utilisé sur les propres surfaces de l'exploitation mais devaient être transportées souvent sur de longues distances. Depuis que le marché de la viande de porc est saturé en Suisse, la branche se tourne vers de nouvelles grandes installations pour le bétail laitier mais aussi et surtout vers de nouvelles constructions pour la production d'œufs et l'engraissement de poulet.
La force motrice derrière ces constructions est l'industrie en amont. Ce sont par exemple des entreprises qui livrent du fourrage ou construisent des étables. Pour chaque nouvelle étable construite qui se base sur l'importation de fourrage, la branche d'aliments pour animaux s'assure à long terme des ventes supplémentaires. Il s'agit de beaucoup d'argent : la vente d'aliments pour animaux représente pour UFA & Co bien 1,5 milliard de francs par an. C'est de loin le plus grand poste de dépenses des familles paysannes suisse (voir illustration ci-dessous). Chaque étable supplémentaire vaut de l'or pour le business de l'industrie des produits fourragers.
Ce sont surtout de grandes halles d'engraissement de poulets qui poussent en ce moment comme des champignons dans certaines régions. Ce sont toujours plus de constructions industrielles qui se trouvent dans le paysage non construit et qui n'ont rien à voir avec une agriculture liée à son sol. Les étables pour vaches surdimensionnées et se basant sur l'achat du fourrage sont tout aussi problématiques.
Cette évolution est en contradiction avec les objectifs de développement du territoire. Elle affecte l'environnement, conduit à la perte de terres cultivables, mais aussi induit une concurrence interne face à la production d'animaux adaptée aux conditions locales et dépendante du sol.
Base légale manquant au niveau de la Confédération
Bien que cette évolution problématique soit connue de la plupart des autorités cantonales, il leur manque presque toujours un moyen d'action de refuser une demande d'autorisation. Cela vient d'une législation déficiente au niveau de la Confédération. La législation actuelle considère la production animale comme production agricole même si la base fourragère n'est pas suffisante ou ne provient pas de l'exploitation même et que la production est basée seulement ou partiellement avec du fourrage importé. Ainsi c'est une production animale indépendante du sol et donc non agricole qui profite de nombreux encouragements provenant de des pouvoirs publics, comme s'il s'agissait d'une production primaire agricole. Parmi ces soutiens publics on trouve des crédits d'investissements, des aides initiales, des paiements directs pour certains types définis de détention d'animaux. En plus, ces projets de constructions profitent de prix de terrain bon marchés puisqu'ils peuvent utiliser quasiment du terrain non constructible.
Malgré quelques restrictions légales, construire aujourd'hui pour une production animale totalement indépendante du sol dans la zone agricole est de facto possible presque sans limitation – grâce à la délimitation des zones d'agriculture intensive, grâce à des modes de calcul futé du bilan de fumure très flexible, ou avec une halle construite à côté d'une petite étable déjà autorisée. Nombreuses conséquences problématiques
L'augmentation de la production animale en deçà d'une base de nourriture régionale a conduit à de nombreuses conséquences problématiques et c'est l'une des raisons principales qui font que les objectifs environnementaux de la politique agricole ne sont pas atteints. Cette évolution impose aux pouvoirs publics de surcroît des coûts consécutifs élevés. Un exemple de conséquence coûteuse qui se chiffre en millions est l'apport d'oxygène de quelques lacs du Plateau comme le Lac de Baldegg, suite aux excédents de phosphate provenant d'achats massifs de fourrage et en conséquence d'engrais de ferme excédentaires. Notamment la production sur une base fourragère importée crée une concurrence interne à l'agriculture dont la plupart des agriculteurs ne semblent pas être conscients jusqu'à présent. Les prix du lait bas sont une conséquence directe de l'utilisation croissante d'aliments concentrés dans la production laitière. Les prix sont aussi sous pression dans le marché de la viande avec chaque kilogramme de viande produite en plus grâce aux importations de fourrage. Cela dessert les intérêts d'une agriculture paysanne et adaptée au lieu.
Fermeté pour la loi sur l'aménagement du territoire
La proportion qu'a atteinte maintenant la production animale non adaptée au site en Suisse, se reflète par exemple dans le troisième rang qu'occupe notre pays pour les émissions d'ammoniac dues à l'élevage en Europe. L'ammoniac est un fort poison pour l'environnement et est responsable de la dégradation de nombreux écosystèmes sensibles comme les forêts ou les marais. Néanmoins les autorisations pour de nouvelles étables ont continué de fleurir ces derniers temps, surtout dans le secteur lucratif de la production de volaille, mais aussi pour la production d'étables bovines surdimensionnées qui se basent sur la fourrage importé. Une adaptation est indispensable dans la cadre de la révision sur la loi sur l'aménagement du territoire pour stopper cette évolution. L'engraissement du bétail sans nourriture propre à l'exploitation n'est pas une production agricole mais bien industrielle. Elle ne doit pas être interdite mais limitée aux zones qui sont délimitées à une telle production au niveau de l'aménagement du territoire : les zones industrielles et artisanales.
C'est d'une telle solution que l'agriculture paysanne profiterait aussi: elle conserverait plus de terres cultivables et réduirait une concurrence interne face à une production de viande industrielle et basée sur l'importation.
Ecologie et bien-être des animaux?
Des cycles d'éléments nutritifs fermés entre le sol, les plantes et les animaux représentent l'élément central d'une agriculture adaptée au site et respectueuse des ressources. Les importantes importations de fourrage pour l'alimentation de l'effectif trop élevé de nos animaux d'élevage détruisent ces cycles. Ils engendrent des problèmes environnementaux aussi bien dans le pays exportateur qu'importateur et ils conduisent au gaspillage de ressources précieuses d'éléments nutritifs et d'énergie.
Les défenseurs d'une production animale indigène la plus grande possible argumentent que la consommation de viande suisse assure aux animaux un bien-être élevé. Le bien-être serait plus important pour les consommateurs que de renoncer à l'importation de fourrages.
Est-ce que l'écologie ou le bien-être des animaux est le plus important ? La controverse dure depuis longtemps. Pourtant une telle querelle n'a pas lieu d'être. Car on passe volontiers sous silence le fait que tout ne va pas bien dans le meilleur des mondes concernant la protection des animaux en Suisse aussi. Les directives légales pour l'engraissement de bœufs et de porcs n'assurent toujours pas un élevage respectant les besoins des animaux. On cache surtout que les agriculteurs à l'étranger peuvent produire de la viande avec des directives au moins aussi sévères et souhaiteraient comme nous en Suisse en tirer un prix juste pour cela.
C'est cette voie que voudrait suivre Migros. Ce grossiste a pris l'année dernière la décision futuriste de s'engager à ce que dès 2020, la viande encore importée dans ses rayons respecte les mêmes standards de bien-être des animaux qu'en Suisse. Tant que la population suisse continuera à prétendre consommer autant de viande qu'elle le fait actuellement, les importations de viande et d'œufs resteront indispensables. Avec l'importation de viande produite conformément aux besoins de l'animal, ce dilemme entre écologie et bien-être des animaux peut être au moins en partie résolu. Si cette voie permet de faire améliorer les normes de protection des animaux à l'étranger, alors c'est un effet secondaire bienvenu.
Les experts sont rarement aussi unanimes: les "bandes fleuries" proposées par l'Office fédéral de l'agriculture (OFAG) comme nouvel élément de compensation écologique nuit à la biodiversité dans les terres agricoles plus qu'elle ne lui est utile. Pourtant la Confédération s'accroche à ces bandes fleuries. Les dessous d'une ineptie.
(VL) Les éléments écologiques dans les grandes cultures représentent environ 6 pour mille de la surface agricole utile dans les régions de cultures, bien trop peu pour prétendre favoriser efficacement la diversité des espèces. Et c'est justement en grandes cultures qu'il y a le plus gros déficit pour le maintien de la biodiversité. On est loin d'atteindre les objectifs environnementaux assignés à l'agriculture suisse. La réflexion est déjà menée depuis des années pour trouver comment améliorer la situation. Le premier pas, même encore hésitant, déjà entrepris dans cette direction est par exemple l'introduction de l'élément écologique "ourlet en grandes cultures", un élément encore peu connu des agriculteurs. En outre des efforts sont entrepris dans certaines régions dans le cadre de projets réseau avec des résultats réjouissants.
Néanmoins il est clair que cela ne suffit pas. Alors certains esprits futés, avec le soutien de l'agro-industrie en amont, ont décelé dans ces déficits en région de grandes cultures un possible champ d'action pour favoriser leurs propres intérêts. Des bandes fleuries, ensemencées presque exclusivement avec cultures intermédiaires non indigènes et à croissance rapide, qui produisent en peu de temps beaucoup de pollen et de nectar, devraient aider les abeilles victimes des cocktails de pesticides. Les agriculteurs devraient être indemnisés pour cela jusqu'à Fr. 3'500.- par hectare. L'argument populaire du soutien aux abeilles est bien sûr porteur et raisonne positivement chez les apiculteurs. Les producteurs de pesticides veulent ainsi montrer que la santé des abeilles leur tient à cœur. Et les semenciers peuvent livrer chaque année les mélanges de graines nécessaires – ce qui rapporte bien plus d'argent que des surfaces écologiques de plus longue durée. C'est une situation Win-Win avec laquelle faire suffisamment de pression sur l'OFAG, qui fait fi des sérieux doutes des experts contre ce type de bandes fleuries.
La critique, que l'OFAG a balayé, était et est virulente. A l'exception des abeilles domestiques, les pollinisateurs sauvages et les espèces menacées d'extinction des grandes cultures ne profitent quasiment pas de ce nouvel "élément écologique", au contraire. Parce que ces bandes fleuries sont de nouveau retournées juste après la floraison, elles agissent comme un piège pour de nombreux insectes comme les abeilles sauvages, qui s'y sont installées mais ne peuvent pas survivre à plus long terme. Encore plus préoccupant : la concurrence faite aux éléments écologiques déjà existants, précieux du point de vue écologique et installés sur une plus longue durée. Car les nouvelles bandes fleuries devraient être laissées sur place seulement 100 jours et pourraient couvrir jusqu'à un demi hectare. Comment atteindre plus facilement les 7% de surfaces écologiques quand on peut comptabiliser dedans les bandes fleuries? Qui voudra encore s'engager sur plusieurs années et s'embêter avec des jachères florales, des prairies fleuries ou des ourlets en grandes cultures?
Le rejet de ces bandes fleuries déjà exprimé depuis un certain temps par diverses organisations, dont Vision Agriculture, a poussé l'OFAG à demander une expertise à la station fédérale de recherche Agroscope Reckenholz. Cette expertise a confirmé que la bande fleurie n'en pas une mesure pertinente, et qu'au contraire elle provoque une fragilisation de la compensation écologique en grandes cultures, à savoir là où se trouvent les plus grands déficits pour atteindre les objectifs de maintien de la biodiversité. L'ensemble des experts interrogés dans le cadre de cette expertise est arrivé unanimement à la même conclusion. Le verdict ne pourrait pas être plus clair.
Dans le cadre de la consultation du train d'ordonnances, Vision Agriculture rejoint entièrement la critique d'Agroscope et des experts consultés. Nous invitons le Conseil fédéral et l'OFAG à ne pas introduire les bandes fleuries comme surfaces de promotion de la biodiversité, nouvelle appellation des surfaces écologiques. A la place, il faut intégrer dans l'ordonnance sur les paiements directs des prairies mellifères dans la catégorie des contributions au système de production, ce qui éviterait une concurrence potentielle avec les surfaces écologiques précieuses déjà existantes.
Nous sommes curieux de voir comment cette absurdité va se terminer. Vision Agriculture reste vigilante à ce sujet.
Le nombre d'habitats différents joue un rôle décisif dans la préservation de la diversité des espèces en région agricole. Les exploitations biologiques qui ne prennent pas de mesures d'encouragement ciblées comme la création de milieux naturels supplémentaires riches en espèces présentent une biodiversité qui n'est que légèrement plus élevée que celle des autres exploitations. C'est ce que montre une étude réalisée dans dix régions européennes et deux régions africaines.
Pour nourrir nos animaux de rente, la Suisse a besoin de presque autant de surfaces cultivables à l'étranger que nous en avons dans notre pays.Avec cette nourriture importée pour nos vaches, on pourrait nourrir plus d'un million de personnes. La pression exercée sur les terres par notre production agricole intensive détériore déjà de manière irréversible la base de production aux dépens des générations futures et d'une alimentation plus sûre en cas de crise.
Aujourd'hui il existe déjà des paiements directs qui doivent compenser les conditions particulièrement difficiles dans les régions de montagne. Une petite partie d'entre eux sont liés à la déclivité ("Contributions pour terrains en pente"), et plus des trois quarts soit 354 millions de francs par année, sont versés en fonction du nombre d'animaux gardés et de la situation de la zone: plus une exploitation est en altitude et plus elle possède de bétail, plus elle reçoit de contributions pour les conditions difficiles ("Contributions GACD").
La réforme agraire amorcée depuis bientôt deux décennies s'est arrêtée pratiquement à mi-chemin. Les instruments actuels de la politique agricole ne sont pas conformes à l'article constitutionnel de 1996. Le Livre blanc de l'agriculture suisse offre une analyse de la situation complète et accessible à tous ; elle met en évidence quelles réformes s'avèrent indispensables à la mise en œuvre d'une politique agricole porteuse d'avenir et conforme à la Constitution. En publiant ce livre, Vision Landwirtschaft pose une première pierre sur laquelle devra s'appuyer le débat qui s'instaurera au sujet de la politique agricole dans les années à venir.
Analyse scrupuleuse. Dans le Livre blanc de Vision Landwirtschaft, les auteurs offrent une documentation complète et critique des derniers développements de la politique agricole suisse et une analyse accessible à tous de leurs répercussions au niveau des exploitations agricoles, de la production de denrées alimentaires et de l'environnement. Sur la base d'un état des lieux scrupuleux, ils proposent des améliorations de la politique agricole, axées de manière ciblée et transparente sur le mandat constitutionnel de l'agriculture – et, partant, sur l'indemnisation des prestations d'intérêt général d'une agriculture productive. Les incidences de l'amélioration du système des paiements directs sont analysées en détail à l'aide de modélisations.
Réalisation des objectifs.Les résultats dévoilent un potentiel d'optimisation inattendu. Les réformes proposées permettent d'atteindre voire de surpasser les objectifs politiques fixés dans le cadre du budget agricole actuel, tout en assurant à moyen terme des revenus supérieurs et une production agricole nette plus élevée. L'agriculture sera ainsi beaucoup mieux armée pour l'avenir, indépendamment d'une plus grande ouverture des marchés.
Le Livre blanc de l'agriculture est en vente dans les librairies ou au secrétariat de l'association. Les membres de Vision Landwirtschaft bénéficient d'un rabais de 10% sur le prix en librairie.